Depuis plus de 150 ans, l’Union Française de la Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie, des Pierres & des Perles (UFBJOP), fédère l’ensemble des acteurs de la filière nationale. Dirigé par Bernadette Pinet-Cuoq, ce vaisseau amiral engagé et proactif, ne perd jamais de vue son cap : développement et compétitivité du secteur.
Le Bijoutier International : Parlez-nous de votre parcours…
Bernadette Pinet-Cuoq : J’ai suivi des études de droit public, avant d’intégrer et de diriger Bijoux GL où j’ai notamment mené, l’intégration d’Altesse. En parallèle, j’ai mené 3 mandats de maire de ma commune de 600 habitants en Ardèche. En 2002, j’ai rejoint l’UFBJOP, comme présidente déléguée puis exécutive, afin de lui donner une vision stratégique d’entreprise. Depuis, je n’ai de cesse, avec le président Daniel Cambour et des équipes formidables, de conforter son organisation afin de répondre aux enjeux de toute la filière et à nos valeurs : fabriquer, former, créer et se déployer.
Le Bijoutier International : Comment se porte la filière BJOP française ?
Bernadette Pinet-Cuoq : La fabrication est dans un âge d’or, avec une production aux niveaux jamais égalés et un CA 2023 qui approche les 5,4 milliards, soit + 17% par rapport à 2022, après +20% entre 2021 et 2022. 95% de ce qui est conçu, fabriqué et fini en France est dédié à l’export. Les 5 plus grands compétiteurs de la joaillerie mondiale sont français, les carnets de commandes sont prometteurs, nos formations sont exceptionnelles. La France s’impose en leader européen de la joaillerie.
Le Bijoutier International : Comment expliquez-vous cet âge d’or ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Avant la crise de 2008, on comptait majoritairement des PME de 50 personnes maximum. L’Union a mis en œuvre un plan de soutien pour garder les compétences et a engagé un travail d’accompagnement sur le long terme. Nous avons encouragé un modèle économique de dépassement de la taille critique, afin d’accompagner la croissance. Les ateliers indépendants se sont ainsi engagés à augmenter leurs compétences et capacités de fabrication. La filière a connu beaucoup de mutations : croissance endogène, développement des ateliers indépendants et des rachats par des grandes Maisons et de nouvelles structures qui ont vocation à grossir. La filière est plurale et sa croissance est tirée par un savoir-faire artisanal reconnu et la capacité à répondre à tous les besoins.
Le Bijoutier International : Comment l’UFBJOP soutient cette dynamique ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Notre force est d’avoir un Conseil d’Administration et des adhérents dans tous les métiers et sur toute la chaîne de valeurs de la filière. Les sujets de notre plan d’action stratégique animent et soutiennent la compétitivité de toutes les entreprises, notamment dans la fabrication. Pour les prochaines années, nous menons des actions autour du point cardinal de la compétitivité : l’attractivité métier et la formation.
Le Bijoutier International : Comment développez-vous l’attractivité métiers ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Nous avons créé, avec le soutien des Maisons et Francéclat, une direction des métiers au niveau de la filière, afin de travailler l’attractivité de nos métiers en amont de la formation. Une convention nationale a été signée avec France travail, pour booster la représentativité de nos métiers auprès des conseillers. Nous menons également une campagne de sensibilisation dans les collèges et lycées et particulièrement en province et en milieu rural, grâce au soutien de l’association Chemins d’avenirs. Avec 2 000 recrutements attendus sur 2 ans, on doit dire au plus grand nombre, que notre filière est ouverte à tous !
Le Bijoutier International : La RSE est aussi un engagement incontournable ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Le risque réputationnel majeur, vient s’ajouter aux évolutions nécessaires sur la place des salariés, le partage de la valeur ou l’engagement environnemental. La RSE, indissociable de l’attractivité, doit s’inscrire dans le dialogue social. Depuis 20 ans, l’Union s’attache donc à consolider notre standard international RJC des bonnes pratiques de tous les métiers et acteurs de la filière. La RSE est une formalisation de cette superbe évolution éthique et de l’exigence de la joaillerie française. Nous accompagnons toutes les entreprises dans cette démarche, en organisant notamment des clubs RSE réguliers.
Le Bijoutier International : Quels sont les atouts de La Haute École de Joaillerie dirigée par l’Union ?
Bernadette Pinet-Cuoq : D’abord une équipe exceptionnelle avec les compétences de 80 formateurs dans tous les métiers, y compris des savoir-faire rares. Avec près de 160 ans d’un fabuleux capital, son identité de marque, sa légitimité et sa communauté sont autant d’atouts forts, tout comme son agilité et réactivité d’école privée. L’école a également toujours eu, au cœur de sa stratégie, les métiers de la fabrication, ce qui la distingue des autres écoles européennes. Avec 700 apprenants dont 400 apprentis sur tout le territoire, notre école représente 70% de parts de marché. Nos établissements proposent de la formation initiale avec des Bachelors, menés avec le soutien de grandes Maisons comme Cartier et de la formation continue, avec des modules techniques courts de professionnalisation.
Le Bijoutier International : Comment ouvrir cette école au plus grand nombre ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Un jour, Pierre Dubail, grand bijoutier et expert Rolex, m’a dit « Je veux rendre au métier tout ce qu’il m’a donné ! ». Ancien élève sertisseur de l’école, il est aussi un talentueux artiste-peintre, qui a reversé les ventes de deux expositions, pour créer la Bourse « Pierre Dubail, la joaillerie pour tous ». Abondée également par l’UFBJOP et Francéclat, elle accompagne les étudiants aux difficultés financières passagères et permet de recruter autrement par l’inclusion. L’ambition est d’intégrer 15% de jeunes dans le dispositif « égalité des chances » avec des prêts de l’école. En lien avec l’association Hello Charly, 3 jeunes préparent déjà un diplôme d’excellence de sertissage/polissage.
Le Bijoutier International : Quelles ambitions porte l’UFBJOP pour demain ?
Bernadette Pinet-Cuoq : Porter toujours plus fort, avec compétences et attention, les enjeux de compétitivité de cette fabuleuse filière, tout en relevant le challenge de la formation et du développement de notre école. Nous continuerons de soutenir tous les acteurs de la filière, à travers les points d’attention de RSE et de la formation, pour que cette dernière soit toujours la force française au cœur des réacteurs de notre compétitivité.
Par Bénédicte ROLLET – Le Bijoutier International Magazine