Diplômé de l’Institut national de gemmologie, docteur en pharmacie, conservateur de la collection de minéralogie de la faculté de pharmacie de Paris XI, Patrick Voillot est avant tout un chasseur de belles aventures. Depuis 20 ans, il parcourt la planète pour partager avec le plus grand nombre, les mines des plus gemmes du monde. Auteur de films, de livres, d’articles, rendez-vous avec ce globe-trotter entre deux expéditions. Florence Gremaud.
Comment êtes-vous « tombé » dans les pierres ?
Comme tous les gamins à l’âge de raison, j’ai commencé la collection d’éléments de la nature : les papillons, les pierres… J’ai fait mes premières découvertes de mines dans l’Hexagone, en Auvergne ! Ce qui m’a toujours animé c’est l’aventure, la chasse au trésor liée à l’humain et le contact avec ce dernier.
Aujourd’hui, quel est votre objectif pour les pierres ?
C’est de retransmettre au plus grand nombre cette passion pour les gemmes, de façon lisible et intelligible. Tout le monde peut comprendre l’aspect hypnotisant des pierres.
Qu’entendez-vous par contact humain et gemmes ?
Le monde des pierres est chargé d’un aspect humain, toujours. Si vous reprenez l’histoire de l’espèce humaine, la pierre a participé constamment à son évolution. Elle représente la racine de la vie, de l’humanité. L’Homme, très tôt a taillé des pierres en haches pour se défendre, puis il a obtenu le feu ce qui lui a permis aussi d’évoluer dans ses outils et son mode de vie.
Vous voulez-dire que la pierre n’existe pas sans l’homme ?
C’est-à-dire que l’Homme magnifie la pierre, la taille et lui donne une valeur symbolique. Par exemple, en Asie et Amérique Centrale, on utilisait jusqu’à l’époque des Conquistadors des haches en jade (qui avait autant de valeur que l’or !). Autre exemple : les hommes préhistoriques couvraient leurs défunts d’hématite, les Egyptiens les couvraient de pierres précieuses.
Chaque civilisation apporte une symbolique différente aux gemmes ?
Oui. Les Perses portaient de la turquoise car le bleu de celle-ci évoquant la couleur des Cieux, avait pour faculté de les rapprocher des dieux. Par exemple, les grandes couronnes des rois chrétiens affichent sur leur fronton, un rubis (ou spinelle tout dépend) pour évoquer le sang du Christ. Oui les civilisations en transformant les gemmes en bijoux, les chargent d’une belle signification.
Combien d’expéditions avez-vous fait en 20 ans ?
J’ai du mal à compter mais bien plus qu’une centaine !
Quelle est la plus marquante pour vous ?
Elles sont toutes extraordinaires mais la plus mythique pour moi est celle vécue au Cachemire en 2001 juste avant le drame du World Trade Center. Je suis d’ailleurs dans les seuls occidentaux à s’être aventuré dans cette contrée… C’est une expédition qui nous a fait parcourir 150 km à pied ; nous avons traversé le haut Himalaya monté jusqu’à 6000 m puis redescendu à la mine de Padder se situant à 4500 m, le tout accompagné de 5 yacks, de 25 porteurs et d’un mignon petit chien !
En quoi c’était extraordinaire pour vous ?
Nous avons traversé des environnements très divers : des glaciers, des éboulis. C’était un coup de poker pour découvrir cette mine, mais en même temps grisant car il n’y avait pas de chemin. A l’arrivée nous avons trouvé des saphirs. Et les paysages étaient magnifiques : au coucher du soleil, avec la lumière, les cimes étaient comme dorées. Aussi les personnes nous accompagnant : par exemple, le guide était moine. Dans ma traversée, je suis tombé dans une crevasse ! En gros, il faut le vouloir pour chasser les trésors de la nature.
Avez-vous peur parfois en expédition même si c’est grisant ?
J’ai toujours peur et je suis sur mes gardes. Mais je conserve toujours une certaine sérénité. En Colombie, une fois j’ai eu peur en effet. En Guinée-Conakry, j’ai eu des frissons car j’ai délivré mon caméraman de la prison parce qu’il avait filmé cette dernière !
Vous êtes obligé de travaillé en amont à chaque fois ?
Oui, à chaque fois c’est un travail de convictions pour obtenir les autorisations au niveau des autorités gouvernementales.
Quelle est votre pierre préférée ?
Toutes m’intéressent ! Mais je suis très attendri par l’aigue-marine du Pakistan. Quand je suis arrivé à la mine à 6000 m, les mineurs ont creusé la paroi et j’ai découvert des cristaux 2 à 4 kg ! En Bolivie, j’ai découvert une géode d’amétrine qui faisait la taille d’une pièce ! Quelle émotion !
Quelle est votre actualité autour des pierres ?
Je poursuis l’organisation de voyages pour la découverte des pierres en organisant des petits groupes de 7 à 8 personnes pour leur faire découvrir le pays, le marché de la pierre, les mines, les négociants. Les personnes sont très heureuses de tant de découverte. Il y a quelque chose d’hypnotique pour ces voyageurs. Je vais publier en mai un livre « Sur la piste des pierres précieuses » aux éditions du Trésor. J’ai des projets audio-visuels pour faire partager au grand public ma passion. Et nous lançons sur notre site, une plateforme d’e-commerce de bijoux basés sur une excellente qualité de pierres : c’est-à-dire que les gemmes sont d’un bon rapport qualité/prix, et montés en bijoux. Bref, j’utilise ma connaissance pour en faire profiter le plus grand nombre. Florence Gremaud.